Encarnación et les missions jésuites guaranis

Située au Sud-Est du Paraguay, à la frontière avec l’Argentine, la ville d’Encarnación incarne pour nous (je sais c’est petit) l’espoir d’une visite qui sorte un peu de l’ordinaire. En effet, le Paraguay ne compte pas des dizaines de sites intéressants pour le touriste ; mais c’est sans compter les missions jésuites qui entourent la ville d’Encarnación. Rapidement mis au courant dans notre hôtel près du terminal, notamment grâce aux installations électriques sommaires (prise dans la douche par exemple, ça décoiffe), on profite d’abord de cette escale pour découvrir la cuisine locale. Tous les midis on mange au comedor de la gare, où une mamita nous sert un magnifique guiso de viande, des coustons (yipeee) et du poroto aux haricots rouges (la prochaine fois on est directement invités dans sa maison !). La chaleur est cuisante ici aussi, mais une averse en fin de chaque après-midi permet de rafraîchir (un peu) l’atmosphère ; c’est d’ailleurs une violente tempête qui nous pousse à rester un bon moment avec la personne en charge de l’office de tourisme, qui nous parle de son pays et sa culture autour d’un téréré. La ville en elle-même est plutôt agréable, les hauteurs sont assez animées par les allées et venues des touristes Argentines qui viennent s’acheter des robes. La zone inondable aux abords du fleuve Paraná est vide, même si une plage assez sympa a été aménagée pour faire trempette –attention boxers interdits par contre-

Mais si l’on vient dans le coin c’est surtout pour suivre les traces de nos amis jésuites. Pour faire face aux bandeirantes Portuguais qui venaient enlever des indiens Guaranis pour en faire des esclaves, des jésuites se portent volontaires pour aller « civiliser la zone ». Dans les années 1700 ils se pointent, généralement 2 par village, et mettent nos Indiens (nomades à l’époque) au travail. Mission : en construire une de mission, leur apprendre à lire écrire en espagnol, latin et guarani, jouer de la musique, pousser la chansonnette et –bien sur – se défendre. Et bien sur j’oubliais 2 ou 3 leçons de catéchisme (par jour !). On compte 30 missions jésuites ainsi construites par les Guaranis où habitaient environ 5000 personnes par site. A la fin du siècle, cette trentaine de cités avait acquis une telle puissance culturelle (ils construisaient des pianos ensuite envoyés à Rome par exemple) qu’ils commençaient à faire de l’ombre aux colonies. L’ordre des jésuites est alors dissout et les missions se font piller, puis restent à l’abandon jusqu’à leur réhabilitation pour le tourisme dans les années 1970. A noter quand même qu’à l’époque, toutes les missions se trouvaient au Paraguay et qu’elles sont aujourd’hui partagées entre le Paraguay, le Brésil et l’Argentine. C’est la triple alliance Brésil-Argentine-Uruguay qui, au milieu du 19^ème siècle, a écrasé le Paraguay et l’a privé d’une bonne partie de son territoire.

Le soir on a même droit à une visite (son&lumières) dans les ruines de Trinidad qui sont les plus grandes et les mieux conservées de toutes les missions jésuites guaranis. Comme les Paraguayens sont très accueillants, ils nous laissent planter la tente devant le site pour une nuit qu’on pensait paisible. Malheureusement, les 30°C à l’intérieur de la tente anéantissent nos espoirs de passer une bonne nuit. Enlever la toile extérieure ne changera pas grand-chose et, comme de gros moustiques nous empêchent de dormir la tente ouverte, on est obligés de dormir dans notre bain marie. Le lendemain, on repart vers notre dernière étape au Paraguay : la Ciudad de Este. Les photos des ruines dans l’album, à partir de la page 2.